
Dans le domaine de la prévention, le dépistage joue un rôle essentiel pour détecter précocement les maladies et améliorer leur prise en charge. Pourtant, en France, il reste encore sous-utilisé, souvent freiné par un manque d’information, des idées reçues ou des réticences psychologiques. Comment lever ces obstacles et encourager une démarche proactive ? Dr Charlotte Berthaut, fondatrice & CEO de Dépist&vous, analyse les principaux freins et partage des leviers concrets pour transformer une démarche passive en un réflexe accessible à tous.
__
Créée en 2020, Dépist&vous est une start-up dédiée à la prévention et au dépistage des cancers à travers une plateforme digitale et des ateliers de prévention en entreprises. La solution compte plus de 4000 utilisateurs et rejoint Mon Espace Santé en 2023.
Pourquoi le dépistage reste-t-il si peu adopté ?
Pour de nombreuses personnes, la prévention est perçue comme une démarche lointaine, parfois anxiogène. La peur du diagnostic est un frein majeur : mieux vaut ne pas savoir, plutôt que d’affronter une réalité qui pourrait bouleverser son quotidien.
D’autres estiment que consulter un médecin en l’absence de symptômes n’a pas d’intérêt. À cela s’ajoute un manque d’information persistant. « Beaucoup ignorent l’existence des dépistages, leur prise en charge ou leur efficacité. Pourtant, près d’un cancer sur deux pourrait être évité en combinant prévention et dépistage », souligne Dr Charlotte Berthaut.
Lever les freins psychologiques et sociaux grâce à une meilleure information
Changer le regard sur la prévention est essentiel. Trop d’individus redoutent le dépistage faute de compréhension de son déroulement et de son utilité. Il est donc fondamental de démystifier le sujet, en expliquant de manière simple et rassurante.
Mais l’information seule ne suffit pas. Elle doit s’accompagner d’une accessibilité accrue pour que le dépistage devienne une étape naturelle du parcours de soin. « L’enjeu est d’ancrer l’idée qu’un dépistage précoce permet d’éviter des traitements lourds et de préserver sa qualité de vie », explique Dr Charlotte Berthaut.
“Sensibiliser, c’est avant tout capter l’attention et créer une connexion avec le public”. Si les réseaux sociaux peuvent être d’une grande aide pour s’adresser aux bonnes personnes, au bon moment avec des formats impactant, le digital ne suffit pas. L’information doit être visible dans les lieux du quotidien : pharmacies, salles d’attente, entreprises, événements locaux.
Lorsque l’on parle de dépistage, l’émotion permet d’humaniser le discours, et ainsi en renforcer l’impact. “Un message de prévention n’a de poids que s’il fait écho à une réalité vécure. Témoignages, récits personnels, échanges directs avec des professionnels...”. Aujourd’hui, l’engagement est plus fort lorsqu’il devient participatif : impliquer des ambassadeurs, des associations, ou même des personnalités publiques permet de donner de la force au message et de créer une dynamique collective.

Comment Dépist&vous lève les barrières du dépistage
“Notre réponse : communiquer, expliquer, et surtout, s’engager !”
Dépist&vous a conçu une approche qui mise sur l’accompagnement et l’accessibilité. Ses outils simplifient le parcours, avec des rappels, des recommandations personnalisées et des formats engageants.
Le dépistage du cancer n’est pas complexe en tant que tel, mais les idées reçues ou le manque d’information peuvent expliquer aujourd’hui cette réalité : moins d’une personne sur deux se fait dépister à temps.
En collaborant avec différents acteurs, Dépist&vous augmente son impact : ”nous aidons les entreprises à sensibiliser leurs collaborateurs et à organiser des actions de prévention. Avec les mutuelles et assureurs, nous développons des solutions adaptées à leurs bénéficiaires, intégrant des parcours de prévention personnalisés”.
Passer d’une démarche passive à une approche proactive
Si la prévention reste encore trop souvent perçue comme une contrainte, c’est aussi parce que le parcours est parfois complexe. Prise de rendez-vous difficile, examens perçus comme chronophages, manque d’incitations concrètes… Autant d’obstacles qui freinent l’adoption des bonnes pratiques.
Rendre ces démarches plus simples et plus accessibles est une priorité. Des initiatives comme des journées de dépistage en entreprise ou l’intégration de parcours préventifs dans les offres des mutuelles peuvent favoriser une adoption plus large. « Il est crucial de valoriser la prévention comme un acte positif : ce n’est pas une contrainte, c’est un moyen de prendre soin de soi. ».
L'information est plus que nécessaire : il faut éduquer le plus tôt possible, et ainsi ancrer la prévention comme un réflexe naturel.
Les proches jouent un rôle clé dans l’engagement en prévention, ils ont un rôle de rappel et de soutien. Une discussion en famille, un témoignage d’ami, accompagner un proche lors d’un examen… Ces interactions aident à lever les réticences et à banaliser l’acte.
« Savoir qu’un proche se fait dépister peut être un élément déclencheur », observe Dr Charlotte Berthaut. Encourager ces échanges permettrait de renforcer l’impact des campagnes de prévention et d’instaurer un effet d’entraînement.

Quel rôle pour les entreprises, assureurs et pouvoirs publics ?
Les acteurs institutionnels et économiques ont un rôle déterminant à jouer dans l’adoption du dépistage à grande échelle. Les entreprises, par exemple, peuvent intégrer la prévention dans leurs initiatives RSE, proposer des journées de dépistage à leurs salariés et relayer activement les campagnes nationales.
C’est dans cette optique que Dépist&vous a lancé le Challenge CAC – Companies Against Cancer – 40, en partenariat avec le GEFLUC. Cette initiative vise à valoriser les entreprises engagées dans des actions concrètes de prévention. « L’objectif est de démontrer que les entreprises peuvent être des acteurs majeurs de la prévention et inspirer un mouvement collectif pour améliorer l’accès au dépistage en France.».
Une initiative lancée ce 4 février 2025, à suivre de près sur les réseaux de Dépist&vous et sur https://cac-gefluc.depistetvous.fr/.
L’IA et les nouvelles technologies : des outils au service du dépistage ?
L’IA permet une personnalisation fine des recommandations et des rappels, optimisant ainsi l’adhésion. Dr Charlotte Berthaut précise : “L’IA ne doit pas remplacer l’accompagnement humain, mais le renforcer. Elle doit être encadrée pour éviter d’exclure les publics les moins connectés. La transparence sur les données est essentielle”.
Quant aux objets connectés, dont le marché ne cesse de croître, ils peuvent jouer un rôle dans le suivi médical, à condition que l’usage des données soit rigoureux et éthique, en garantissant la fiabilité des données et leur protection.
L’avenir de la prévention : rendre la démarche simple et collective
Personnalisation accrue, télémédecine, gamification de la prévention… L’avenir du dépistage passera par des solutions plus engageantes et accessibles. Mais pour que la prévention devienne un réflexe collectif, il faudra avant tout la rendre simple, désirable et intégrée au quotidien, afin qu’elle ne soit pas vécue comme une contrainte ou une obligation médicale.
« Plus elle sera intuitive, valorisée et portée collectivement, plus elle deviendra un réflexe naturel », conclut Dr Charlotte Berthaut.
__
La prévention doit s’intégrer dans notre quotidien et être portée par tous les acteurs de la société - du citoyen, au professionnel de santé, en passant par les institutions et les entreprises. Tout le monde a un rôle à jouer.